TROIS TEMPS, TROIS ATELIERS
EXPOSITION DE L’ARTISTE PIERRE MORIN
Salle Desjardins, du 10 mars au 2 avril 2023

Le lac à la grenouille (Photo : Pierre Morin)
PIERRE MORIN
J’ai fait mes études en arts visuels à Québec à la fin des années soixante et au début des années soixante-dix, à l’époque où l’école des beaux-arts est devenue la faculté des Arts visuels de l’Université Laval. Après mes études, j’ai enseigné les arts plastiques au secondaire pour une brève période. N’ayant pas suffisamment la vocation pour l’enseignement ni les conditions favorables pour vivre de l’art pur, je me suis alors perfectionné en graphisme, ce qui m’aura permis de sécuriser les besoins d’une famille tout en faisant une carrière près de ma réalité, soit dans le métier des arts graphiques, de l’illustration et des communications. Il va sans dire que mon besoin de peindre ne m’a jamais quitté et comme notre réalité finit toujours par nous rattraper, j’ai donc pris la décision au printemps 2007 de suivre ma véritable voie: la peinture. Je vis pour peindre et je peins pour vivre.
Depuis ce jour, je suis au travail de la peinture et du dessin avec ardeur et passion. Je donne des cours, des ateliers, des conférences, et je fais régulièrement des expositions et je pilote des projets artistiques éducatifs dans des écoles du Nunavik.
DÉMARCHE ARTISTIQUE
« MON APPROCHE DE LA PEINTURE VISE D’ABORD À TÉMOIGNER DE LA BEAUTÉ DANS LA NATURE, DE LA PAIX ET DE L’HARMONIE QUI S’Y RETROUVENT. JE COMBINE AVEC MODESTIE ET RESPECT LA PRATIQUE DE L’ART RÉALISTE À L’ART IMPRESSIONNISTE. »
D’aussi loin que je puisse me souvenir, j’ai toujours ressenti un plaisir intense à regarder, à observer, à sentir et finalement à voir vraiment ce que la lumière révèle, une sorte de transcendance de l’acte de regarder. C’est une expérience grisante et jouissante à la fois. Tout passe par les yeux et ensuite s’amplifie en se transformant et en rebondissant sur les parois de l’âme. C’est là que se croisent pour moi « les plaisirs de voir aux plaisirs de peindre ». Cette façon de prendre contact avec ce qui m’entoure est à la base même de ma démarche artistique, dans l’art figuratif. Je suis conscient que ce terrain a été et est encore passablement jardiné et même en sachant que je laboure très probablement au même endroit que certains du groupe des Sept, je reviens toujours sur ce terrain! à la peinture figurative dans la tradition des beaux-arts. Je me positionne comme peintre réalisto-impressionniste, c’est-à-dire que je chevauche les deux manières à la fois. C’est simple, je ne suis ni l’un ni l’autre. Toutefois, la facture finale ne présente pas systématiquement les deux styles en importance proportionnel.
La lumière est une autre composante à la base de ma démarche : chercher le rôle précis de la lumière propre à chaque sujet me procure des sensations intenses. Il n’y a rien de nouveau dans le fait de citer que la lumière est d’une importance capitale en art visuel. La lumière demeure la vie subtile qui coule dans l’œuvre, comme l’énergie dans notre corps. Le dessin, le sujet, la composition, le rythme, les couleurs, tous sont animés par la lumière. Peut-être est-ce aussi la découverte du rôle de la lumière dans ses aquarelles qui a poussé Henry Miller à dire cette phrase célèbre : « peindre, c’est aimer à nouveau ». Miller avait saisi la fonction spirituelle de la lumière dans la peinture.
La nature la plus sauvage, la plus intacte et la plus canadienne possible est certainement la source d’inspiration la plus significative pour moi. Il faut savoir que la nature a très souvent été salutaire pour moi; certains se perdent dans la forêt, moi je m’y retrouve. Toutefois, je ne saurais me limiter aux paysages car la nature est partout: dans une ville, dans une pomme, dans des fleurs, dans un corps, bref, la nature est partout même dans un rêve; les surréalistes ont largement exploré la nature des choses sous cet angle. Il est très important pour moi que ce qui m’interpelle ne m’échappe pas et également que je puisse traduire cette inspiration en un acte de peindre. D’autre part, je ne supporte pas d’être captif dans un style qui dépend d’une tendance, de sujets répétés, de recettes opportunistes, de matériaux ou de textures quelconques ou de toutes autres particularités limitatives du genre. Disons que je dois avoir le choix de peindre la nature toute chose sans limite; si un clou me fait vibrer, il deviendra un dessin ou une peinture.
Je poursuis continuellement cette magie que seule la peinture peut arriver à créer dans le monde visuel. Je crois qu’une œuvre est véritablement habitée lorsqu’on perçoit que c’est elle qui nous regarde.